:: David Bowie, l’alchimiste électrique
On pourrait dire que David Bowie est mort en 2016, mais c’est faux : il vit encore dans chaque recoin de la pop moderne, fantôme rieur qui a tatoué ses métamorphoses sur nos ADN sonores.
Derrière ses pupilles bicolores, il avait compris avant tout le monde que le rock était un masque - et qu’on pouvait le changer à chaque respiration. Ziggy Stardust, Thin White Duke, icône berlinoise sous la neige, crooner malade de soul : Bowie a usé la peau du rock jusqu’à l’os.
Sur Low, il avale le krautrock, recrache des nappes froides comme un matin sur Alexanderplatz. Sur Heroes, il sculpte l’hymne d’un monde coupé en deux, voix noyée dans l’écho, guitare de ferraille fondue. Sa voix ? Caméléon aussi : féline, traînante, ultra-précise. Écoutez “Ashes to Ashes” : un clown mélancolique en orbite, junkie magnifique, prophète du vide postmoderne.
Bowie a fait exploser les frontières : du glam baroque à la funk blanche, de la cold wave à l’électro, de la science-fiction aux confessions intimes. Sans lui, pas de Madonna métamorphe, pas de Gaga monstrueuse, pas de rappeurs mutants surfant sur l’androgyne. Il a offert à la pop la permission d’être théâtre, cinéma, peinture abstraite.
Sa mort n’a rien clos : Blackstar, testament labyrinthique, nous toise encore. Saxophone vrillé, groove vénéneux, murmures d’un homme qui regarde le néant droit dans les yeux. Bowie reste là, star noire, lumière mouvante - dernier pionnier à nous rappeler qu’un artiste, ça se réinvente ou ça crève.