France : Etienne Daho - Pop Satori
1986. La France a encore des relents de rock blafard, coincée entre variétés trop sages et new wave importée d’Angleterre.
Et voilà qu’Étienne Daho balance Pop Satori - un disque qui n’a pas peur de danser avec les fantômes du Velvet, de Gainsbourg et des clubs berlinois. Un album qui ressemble à une nuit blanche sur les toits de Paris, entre spleen et néons.
Daho n’est pas un chanteur à voix. Il est un conjurateur. Il chuchote plus qu’il ne clame, mais ses mots s’impriment, sensuels, urbains, modernes. La production de Rico Conning (Wire, Depeche Mode) insuffle une élégance synthétique : boîtes à rythmes fines comme du cristal, guitares nappées, basse qui pulse comme un cœur sous cocaïne. Tout est fluide, liquide, prêt à se répandre dans les veines.
Écouter Pop Satori, c’est entrer dans une bulle nocturne. "Epaule Tattoo" coule comme une évidence pop, "Tombé pour la France" devient un hymne générationnel, et "Paris, le Flore" plante le décor d’un dandysme désabusé, caféine et cigarettes. On imagine les nuits du Palace, les corps qui se frôlent, l’ivresse qui brouille les contours.
Ce disque a vieilli comme un parfum rare : pas daté, mais encapsulé. Il porte en lui les années 80, oui, mais les transcende. Là où tant d’albums de l’époque sentent la naphtaline, Pop Satori garde une fraîcheur étrange, une mélancolie hédoniste.
Personnellement, je n’arrive jamais à l’écouter sans penser à une ville qui ne dort pas, à ces instants où tout semble possible et déjà perdu. Pop Satori est une carte postale de minuit. Une invitation à errer.