France : The No Comprendo - Les Rita Mitsouko
Il y a des disques qui ne vieillissent pas, non pas parce qu’ils sonnent modernes, mais parce qu’ils restent indomptables. "The No Comprendo" (1986), deuxième album des Rita Mitsouko, est de ceux-là.
Un objet mutant, qui ne cherche pas l’équilibre : il danse au bord du gouffre, maquillé de couleurs criardes, mais glacé sous la peau.
L’album s’ouvre sur “Les Histoires d’A.”, théâtral et électrique, comme une invitation à plonger dans un Paris en diagonale. Puis viennent “Andy” et “C’est comme ça”, explosions de pop et de punk, de funk et de cabaret. Catherine Ringer hurle, caresse, charme ; Fred Chichin gronde, frotte ses guitares comme on allume un incendie. Le duo refuse les cases. Pas new wave, pas chanson française, pas funk, pas punk. Tout à la fois, et surtout autre chose.
Tony Visconti, derrière la console, sculpte les sons : guitares tranchantes, synthés hallucinés, basse qui roule comme un cataclysme. Chaque morceau est un décor de cinéma cheap où l’électricité fait sauter les ampoules et les repères.
Ce disque, c’est Paris vu de travers. Les clubs, l’ombre des années Sida, la fête qui tremble sous la peur. Mais aussi une liberté rare : deux artistes qui s’autorisent tout, qui inventent leur langue dans un monde où tout semblait déjà pris.
The No Comprendo n’explique rien. Il laisse le désordre parler. Et trente ans plus tard, c’est ce désordre qui nous tient encore debout.