Frenchies : Répression - Trust
Dès les premières secondes de "Antisocial", le son vous prend à la gorge, une claque sèche, un uppercut d'acier forgé dans la colère des Trente Glorieuses finissantes.
1980. La France est en apnée, et Trust lui offre un poumon d’air vicié, mais vital. Répression, ce n’est pas un disque ; c’est un tract, un poing levé, l’écho brutal des usines qui ferment et des utopies qui s’éteignent. Cet album a tout changé, il a donné au rock français sa dimension sociale la plus incisive, sa voix la plus crue.
Le contexte est tout : l’enregistrement, mené dans une urgence fébrile, capture cette tension. L’histoire veut que l’ambiance en studio était électrique, nourrie par une rage collective. Côté technique, le son est lourd, terriblement efficace. Le riffing de Nono est d’une simplicité dévastatrice, le groove de Jeannot (batterie) et Yves (basse) est un métronome qui martèle la conscience.
Et puis il y a Bernie, le tribun, le poète de la rue. Son phrasé, ce débit saccadé, quasi-punki, est l’arme absolue de l’album. Sur le mythique “Antisocial”, la structure est imparable : un couplet haletant, une montée en puissance et ce refrain monolithique, crié comme un slogan.
Je me souviens de la première écoute, le choc de ce mélange de Led Zeppelin et de rage post-77. C’est l’album qui a prouvé qu’on pouvait parler de chômage et de matraque avec des guitares hurlantes. Un chef-d’œuvre. Répression a gravé le rock français dans le marbre de l’Histoire, non pas comme un divertissement, mais comme une nécessité.

