Highway 61 Revisited : l'apocalypse au bout des doigts
Juillet 1965. Dylan branche sa Fender Stratocaster et le monde bascule dans un chaos électrique irréversible.
Highway 61 Revisited n’est pas seulement un disque ; c’est le bruit d’une collision frontale entre la poésie surréaliste et le bitume fumant des États-Unis. On oublie trop souvent la violence du choc. En studio, l’ambiance est électrique, presque anarchique. Bob, lunettes noires vissées sur le nez, crache ses textes-fleuves tandis que Mike Bloomfield lacère l’air de ses riffs bluesy et qu’Al Kooper improvise cet orgue devenu légendaire, presque par accident.
Techniquement, l’album invente un nouveau langage : un folk-rock convulsif, saturé de cynisme et d’une urgence vitale. La production de Bob Johnston est brute, laissant respirer les imperfections qui font l’âme du disque. On sent la tension des bandes qui défilent, le souffle court d’un homme qui fuit son statut de “prophète folk” pour devenir un Rimbaud des autoroutes.
Chaque morceau est une fresque peuplée de personnages grotesques et de prophètes déchus, portés par une batterie métronomique et des envolées de piano bastringue. C’est sale, c’est brillant, c’est impitoyable. À l’écoute, j’ai toujours l’impression de traverser un désert en feu où la seule issue serait de rire de l’absurdité du monde. Un big bang sonore.

