:: Smells Like Teen Spirit : l’explosion Teen Spirit
Un riff comme une gifle. Quatre accords en boucle, aussi simples que dévastateurs.
Smells Like Teen Spirit n’ouvre pas seulement l’album Nevermind : il fait sauter la serrure de toute une décennie. Quand Nirvana débarque en septembre 1991, le rock est à genoux, maquillé de glam, robotisé par le hard FM. Et soudain, cette déflagration. Ce cri. Cette rage floue, adolescente, mais lucide.
Kurt Cobain n’écrit pas un hymne. Il crache un brouillard. Les paroles sont un chaos cryptique, un foutoir de slogans et de non-sens - mais c’est précisément là que réside leur force : elles disent tout ce que la génération X ne parvient pas à formuler. Here we are now, entertain us : injonction absurde, ironique, désabusée. Nirvana ne propose pas de solution, juste un miroir tendu à une jeunesse anesthésiée.
Musicalement, c’est une tornade contenue : la dynamique quiet/loud, empruntée aux Pixies, devient ici une arme de destruction massive. Le couplet traîne, fume, doute ; le refrain explose, abrasif, incontrôlable. La voix de Cobain n’est pas chantée, elle est arrachée. La batterie de Grohl, c’est un bulldozer. Et la basse de Novoselic ? Une colonne vertébrale somnambule, mais essentielle.
Le morceau fait basculer le rock alternatif dans la lumière - et le transforme en business. MTV en boucle, majors en chasse. Nirvana devient malgré lui le visage d’un mouvement qu’il méprise déjà. Smells Like Teen Spirit est un suicide commercial déguisé en triomphe planétaire.
Et dans le fracas de cette chanson, c’est tout le spleen des années 90 qui gronde. Une génération perdue a trouvé sa bande-son.